Collection « Sillages »

  • Treks au Népal
  • La 2CV vagabonde
  • Ísland
  • Habiter l’Antarctique
  • Cavalières
  • Damien autour du monde
  • À l’ombre de l’Ararat
  • Moi, Naraa, femme de Mongolie
  • Carpates
  • Âme du Gange (L’)
  • Pèlerin de Shikoku (Le)
  • Ivre de steppes
  • Tu seras un homme
  • Arctic Dream
  • Road Angels
  • L’ours est mon maître
  • Sous les yourtes de Mongolie
  • Cavalier des steppes
  • Odyssée amérindienne (L’)
  • Routes de la foi (Les)
  • Aborigènes
  • Diagonale eurasienne
  • Brasil
  • Route du thé (La)
  • Dans les pas de l’Ours
  • Kamtchatka
  • Coureur des bois
  • Aux quatre vents de la Patagonie
  • Siberia
  • Sur la route again
  • À l’écoute de l’Inde
  • Seule sur le Transsibérien
  • Rivages de l’Est
  • Solitudes australes
  • Espíritu Pampa
  • À l’auberge de l’Orient
  • Sans escale
  • Au pays des hommes-fleurs
  • Voyage au bout de la soif
  • Errance amérindienne
  • Sibériennes
  • Unghalak
  • Nomade du Grand Nord
  • Sous l’aile du Grand Corbeau
  • Au cœur de l’Inde
  • Pèlerin d’Orient
  • Pèlerin d’Occident
  • Souffleur de bambou (Le)
  • Au vent des Kerguelen
  • Volta (La)
  • Par les sentiers de la soie
  • Atalaya
  • Voie des glaces (La)
  • Grand Hiver (Le)
  • Maelström
  • Au gré du Yukon
Couverture
L’heure des bibliothèques :

« Aujourd’hui encore, la Patagonie ne possède pas de vestiges séculaires, son passé n’est pas gravé dans la pierre. Trop retirée, trop inaccessible. C’est une région à part. Elle ne remplit pas les caractéristiques qui en feraient le décor idéal au dévoilement d’une ruine ayant traversé les siècles. Elle n’a pas la dimension romanesque qui sied aux chaleurs torrides de l’eldorado propagées par les clichés : fleuves boueux, jacarandas, scorpions, anacondas, piranhas, grenouilles tueuses, insectes suceurs. Le tout dans un cadre parfait pour accueillir les récits les plus incroyables : tropiques luxuriants frappés d’une touffeur oppressante, hostiles si possible, saturés d’humidité, pleins de l’aboiement des singes tantriques et des cris de perroquets, des restes de pyramides à degrés flanqués de bas-reliefs de serpents à plumes qu’on imagine préservés sous des nappes de nature dévorante…
La cité des Césars n’éveillait aucune de ces images. Elle se distinguait en plusieurs points des autres eldorados. Ce n’était pas une relique précolombienne mais une création née des tragédies de la Conquête. De plus, son invention ne précédait pas l’arrivée des Espagnols, elle était le fruit d’événements survenus dans les premiers temps de la rencontre avec l’Amérique. C’était une importation européenne. Elle seule avait une chape historique avérée, des racines sur le nouveau continent. Cette distinction lui donnait une autre allure. Le scénario était simple. Des équipages entiers avaient fait naufrage sans laisser de traces. Ceux qui étaient arrivés dans leur sillage avaient brodé sur leur sort, ne pouvant se résoudre à leur disparition pure et simple. Ils avaient magnifié le destin dramatique de leurs prédécesseurs et leur avaient attribué la fondation d’une cité douce et prospère. Sur les faits s’était alors élevée la charpente d’une légende qui s’était naturellement fixée en Patagonie.
Je prenais également conscience que l’énigme des Césars était devenue secondaire. Je préférais l’intrigue d’une pierre de Rosette à déchiffrer au paradis offert d’une cité radieuse. C’est le réel changé en sa légende qu’il me restait à explorer. Au fil de mon enquête, mon gouvernail avait trouvé sa voie : il s’agissait maintenant de savoir si des hommes avaient eu des chances de survivre et de s’installer durablement dans un lieu de la Patagonie que le mythe tenait pour existant. À plus de quatre siècles de distance, rien ne m’interdirait de m’aventurer dans le sillage de ces marins oubliés, victimes du devoir pour la majorité, et d’aller voir moi-même si les parages du détroit de Magellan ne seraient pas plus bavards que les archives étalées sous mes yeux. Mais je n’en étais pas encore là.
Il ne fallait pas se formaliser, ni s’appuyer sur les dates ou sur une priorité chronologique. L’organigramme des avancées dans les terres pouvait être trompeur. Depuis le périple de Francisco César en 1526, les bruits de cette nouvelle cité fabuleuse se répandaient comme une traînée de poudre. Tout ce qui s’aventurait vers le sud et la Patagonie était implicitement en quête de la cité des Césars, qui devint le terme générique pour évoquer une contrée de mystères fondée par des marins échoués. Les conquistadors fougueux qui allaient désormais se propager sur ces dernières marches du continent ne se figuraient pas mentalement son immensité. Ils espéraient avant tout des nouvelles de ceux situés de l’autre côté des montagnes, indigènes ou éventuels compagnons de sang espagnol.
Parmi les aventuriers qui s’élancèrent à la poursuite de Trapalanda, j’appris que les Jésuites figuraient à l’avant-poste. Premiers missionnaires établis dans le sud du Chili au début du XVIIe siècle, ils tenaient à s’assurer des bonnes mœurs religieuses et des pratiques adoptées par les naufragés du détroit. C’était une donnée de poids dans mon enquête car des hommes se réclamant de Dieu étaient plus disposés à se faire accepter des natifs pour ratisser l’inconnu que des hommes en armes. »
(p. 54-56)

Chiloé (p. 85-87)
Le Sud à petite vapeur (p. 153-156)
Extrait court
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