Collection « Compagnons de route »

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Couverture

Paul Morand, Voyageur impénitent
Dominique Lanni


Peu nombreux sont les écrivains qui peuvent se targuer d’avoir davantage arpenté le globe que Paul Morand.

Né en 1888 à Paris, d’un père artiste et d’une mère issue de la petite bourgeoisie parisienne, Paul Morand est scolarisé chez les Maristes. Élève médiocre, il reçoit sa première leçon de planète grâce à l’Exposition universelle de Paris qui ouvre ses portes à deux pas de son logis. Il y connaît ses premiers appels de l’ailleurs en visitant les pavillons de l’Indochine, du Dahomey, de Ceylan, de la Russie? Très tôt, il se rend en Italie du Nord, à Venise notamment, avec ses parents, qui l’envoient ensuite passer plusieurs étés à l’étranger, à Londres, pour y apprendre l’anglais. Du fait de son échec au baccalauréat de philosophie, il passe l’été 1905 à Munich. Son répétiteur se nomme Jean Giraudoux. C’est le début d’une amitié qui ne finira qu’avec la mort de ce dernier. Reçu premier au petit concours des chancelleries, puis premier au grand concours des ambassades, il est nommé attaché à Londres. Durant le premier conflit mondial, outre cette capitale, il se voit affecté à Paris, Rome et Madrid. C’est au cours de cette période qu’il compose son premier recueil de poèmes, Lampes à arc, et son premier recueil de nouvelles, Tendres stocks, qui paraît en 1921, préfacé par Proust.

Si ces premières publications lui valent des succès d’estime, c’est avec ses recueils de nouvelles Ouvert la nuit (1922) et Fermé la nuit (1923), puis avec son roman Lewis et Irène que Paul Morand s’attire les faveurs de la critique et du public, atteignant des tirages record. En 1925, la parution de L’Europe galante coïncide avec sa lassitude du Vieux Continent. Envoyé assurer la gérance de la légation de France au Siam, il en revient avec Rien que la Terre (1926), un tour de planète à bâtons rompus, et Bouddha vivant (1927), un roman explorant les relations entre Orient et Occident. La fin des années 1920 correspond à sa période nègre. Sillonnant les États du sud des États-Unis, les Antilles et l’Afrique, il en rapporte Magie noire (1928), un recueil de nouvelles, ainsi que Paris-Tombouctou (1928) et Hiver caraïbe (1929).

Au cours des années 1930, s’essayant au cinéma, puis au théâtre – avec plus de succès –, il se voit confier diverses missions en Europe du fait du contexte international tendu. Parallèlement, il rédige nombre de chroniques qui paraissent en recueil au fil des ans. C’est durant cette période que l’écrivain cosmopolite opère un repli sur la défense de la race blanche et les valeurs occidentales. Nommé à la commission du blocus à Londres à la fin de 1939, il quitte la capitale anglaise au moment de la débâcle, rapatriant sa mission sans ordre express, ce qui lui vaut sa mise à la retraite d’office. Mais le retour de Laval à la présidence du Conseil en avril 1942 lui permet de rallier le gouvernement de l’État français qui a établi ses quartiers à Vichy, avant d’être nommé ministre de France à Bucarest l’année suivante, puis ambassadeur de France à Berne au début de l’été 1944. La chute de l’État français écourtant drastiquement son mandat et pour échapper à l’Épuration, Paul Morand et son épouse demeurent en Suisse, à Territet-Mont-Fleury, puis au château de l’Aile. Vivant là en proscrit durant près de dix ans, ne s’accordant que quelques rares fuites en Espagne ou à Tanger où il a fait l’acquisition d’une demeure, la Villa Shakespeare, il tente de revenir avec un roman ambitieux, Montociel, rajah aux Grandes-Indes (1947) puis Le Flagellant de Séville (1951), son meilleur roman. Mais la critique ne lui pardonne pas son attitude pendant la guerre.

Les fumées des feux de l’Épuration s’étant dissipés, il revient de plus en plus souvent en France et recommence à voyager à travers le monde. Il publie du théâtre, des recueils de nouvelles, son genre de prédilection, et revient progressivement sur le devant de la scène, grâce à Roger Nimier et aux Hussards. Il se présente à l’Académie française. Mais sa candidature suscite une levée de boucliers. La quatrième candidature sera la bonne : il sera finalement élu en 1968. Son épouse ne pouvant plus l’accompagner du fait de sa santé déclinante, Paul Morand continue de voyager, en Europe, au Proche-Orient, partout où sa curiosité et l’appel de l’ailleurs l’attirent, mais seul.

Se sentant au crépuscule de son existence, il rédige Venises (1971), son dernier portrait de ville, et son testament littéraire. Un an après la mort de sa femme, il succombe à son tour, en pleine canicule de l’été 1976. Ses cendres sont mêlées à celles de son épouse dans le tombeau des Economo-Helmreichen dans le cimetière orthodoxe de Trieste, face à la mer.

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