Interviews


Paris (France)
Année 2007
© Luc Pierrart

Valérie François – Le rêve d’une complicité trouvée
propos recueillis par Matthieu Delaunay

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Vous sentez-vous journaliste ou voyageuse ?
Ce voyage à la rencontre des Sibériennes a été un premier pas dans le journalisme. Dans mon esprit, il n’a jamais été question de concevoir ce voyage avec une optique touristique. En Sibérie, je voulais apprendre des choses, parler de sujets forts. Mais ce qui m’attire dans le voyage, c’est aussi l’aventure. Tout cela fait que je me sens une âme de journaliste… voyageuse !

Cette expérience influe-t-elle sur votre travail ou vos projets ?
Pour tout journaliste, ce que j’ai fait avec Géraldine Bérard est exceptionnel ! Je crois pouvoir dire que chacun rêve dans sa vie professionnelle de réaliser ce genre de reportage. Mais, c’est un luxe rare qui représente un investissement. Alors, bien sûr, c’est typiquement le genre de production que j’aime et que je voudrais refaire. Il est certain que je repartirai à la rencontre d’autres femmes, pourquoi pas en France. Je me vois mal rapporter autre chose que des textes et des photos ; la vidéo, c’est extrêmement compliqué quand on est seulement deux. Mais qui sait ?

Qu’est-ce qu’être une femme russe ?
L’image renvoyée par la Sibérie est souvent celle du froid, du Goulag, du Transsibérien, ou des trappeurs… Peu de gens songent aux femmes ! Ce voyage nous a ouvert les yeux sur la problématique des femmes et leurs rapports aux hommes. La femme russe est bien souvent seule et fait face à de nombreuses difficultés. Dans ce pays, le déficit d’hommes est très important et il est compliqué de refaire sa vie. La situation économique n’est pas non plus florissante et ces femmes travaillent dans des conditions ardues qui les incitent, pour la plupart, à regretter l’Union soviétique. Les jeunes filles, elles, ne souhaitent qu’une chose : migrer vers les grandes villes. Mais ce tableau noir n’empêche pas les Sibériennes d’être d’un dynamisme déconcertant et de cultiver un sens de la dérision et de l’humour admirable !

Un souvenir, une image qui vous a particulièrement marquée ?
Beaucoup de moments m’ont émue. Je garderais quand même le pique-nique à Kolianov. Nous étions cinq et les réjouissances ont commencé à 9 heures du soir pour se terminer à 5 heures du matin ! C’était formidable cette complicité, ces rires, ces conversations. La barrière de la langue n’existait plus ; nous étions en phase. Géraldine et moi, quand nous nous imaginions en voyage, c’est à ce genre de moments que nous rêvions. Ce fut une soirée magnifique, sûrement la plus belle.

Avez-vous lu au cours de votre périple ? Depuis votre retour, un livre vous a-t-il particulièrement touchée ?
Pendant notre voyage, nous étions parties avec le Napoléon de Max Gallo. Un livre pas trop passionnant pour ne pas le lire trop vite et suffisamment gros pour tenir quatre mois. Napoléon est un personnage que les Russes admirent et connaissent. En rentrant, j’ai lu Le Vertige d’Evguenia Guinzbourg, c’était très fort parce que, deux mois après mon retour, j’étais encore très marquée. J’ai rarement autant pleuré qu’en lisant ce livre !
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