
Retours en Iran
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Iran ou Perse� ? L�€�histoire de cette dénomination est née, au fil des siècles, de choix idéologiques. L�€�Iran était connu, partout dans le monde, sous le nom de «� Perse� » jusqu�€�en 1935. C�€�est Reza Shah Pahlavi, père du dernier souverain ayant régné sur ce pays, qui, le 21 mars de la même année, somme officiellement la communauté internationale d�€�utiliser le nom «� Iran� »� : un vocable cher � la dynastie sassanide (224-651), âge d�€�or iranien, tant sur le plan artistique que politique et religieux. Une manière également de se réclamer des origines aryennes («� Iran� » signifie «� pays des Aryens� ») de son peuple et de se démarquer ainsi de l�€�influence islamique héritée des invasions arabes du VIIe� siècle. Aujourd�€�hui, la population iranienne est évaluée � près de 70� millions d�€�habitants. Sa capitale, Téhéran, est � cinq heures trente de vol de Paris. La superficie du pays est de 1� 648� 000� km2 (soit trois fois la France). Le «� plateau� » iranien est un véritable carrefour géographique entre Asie Mineure et Asie centrale d�€�une part, Indus et Mésopotamie d�€�autre part. Sans compter le grand voisin russe et toutes les ex-républiques soviétiques alignées le long de sa frontière nord qui comprend également le littoral de la mer Caspienne. L�€�Iran, dont 95� % de la population est musulmane, est devenu une république islamique en 1979, après le renversement du dernier de ses rois, Mohammad Reza Chah. Une nouvelle constitution a alors été instaurée dont les principes proviennent de l�€�islam chiite. Le chef de l�€��‰tat est désormais le «� Guide de la révolution� », choisi parmi le haut clergé. Il supervise les politiques du gouvernement dirigé par le président de la République, élu pour un mandat de quatre ans. L�€�islam chiite, largement majoritaire, est la religion d�€��‰tat. Son nom dérive de «� chi�€�at-e Ali� » ou «� parti d�€�Ali� » du nom du gendre de Mahomet ayant contesté le pouvoir des califes arabes qui s�€�étaient posés en successeurs du Prophète. De l� est née la grande scission entre «� orthodoxes� » de la foi (les «� sunnites� ») et «� séparatistes� » (les «� chiites� ») croyant en une succession du Prophète justifiée uniquement par les liens du sang. Le chi�€�isme ayant compté ses adeptes essentiellement parmi les Iraniens fut promulgué en 1501 religion d�€��‰tat sous le règne safavide de Shah Abbas. Ainsi officialisée, cette foi devint également un puissant ferment nationaliste auprès de la population iranienne, ce que l�€�on a constaté jusque dans la révolution de 1979 qui a provoqué la chute du régime du shah et l�€�avènement au pouvoir de l�€�imam Khomeyni. La langue officielle est le persan. Les Iraniens parlent majoritairement cette langue issue de la famille indo-européenne, transcrite en caractères arabes et faisant partie de la famille indo-iranienne, comme le pachtou, le kurde, le baloutche, le tadjik, l�€�aïmak, le hazara, l�€�ossète,� etc. C�€�est donc un pays � part dans le Moyen-Orient, entouré de contrées turcophones (Turquie, Turkménistan, Azerbaïdjan), arabophones (Irak, Koweït, Arabie Saoudite, Qatar, �‰mirats arabes unis) ou bien indo-pakistanais, où les musulmans sont majoritairement d�€�obédience sunnite. Les Persans constituent la moitié de la population, qui compte notamment aussi des Azéris (20� %), des Kurdes (9� %), des Louri (6,6� %), des Arabes (2,1� %), des Turkmènes (1,5� %) et des Baloutches (1,3� %). Mosaïque ethnique, l�€�Iran présente des visages multiples, selon que l�€�on se déplace vers le littoral caspien et ses paysages de rizières, que l�€�on suive les voies caravanières du nord �€“ l�€�ancienne route de la soie �€“ ou que l�€�on parcoure la colonne vertébrale nord-sud qui relie la Caspienne au golfe Persique, autre artère commerciale débouchant sur les villes mythiques que sont Chiraz, Yazd ou Ispahan. Sans parler des vestiges archéologiques majeurs de l�€�Antiquité que sont les sites mondialement connus de Pasargades et de Persépolis. Qu�€�en est-il aujourd�€�hui de ce pays, melting-pot de races et de cultures, partagé entre tenants de la tradition et de la modernité� ? L�€�étranger qui voyage dans l�€�Iran du XXIe� siècle ira de surprise en surprise en découvrant une nation cultivée et curieuse des évolutions de son époque, informée des toutes dernières technologies et entrée de plain-pied dans l�€�ère numérique. Qui saura aller au-del� du jeu trompeur des miroirs aura le sentiment, au contact de ces peuples, d�€�être un peu chez lui, avec � la clé un voyage fascinant � travers un héritage culturel remontant aux plus anciennes civilisations de l�€�humanité.
Reza Afchar Nadéri a passé sa jeunesse � Téhéran, sous la dynastie des Pahlavi, alors que l�€�américanisation allait bon train et que Cadillac et Harley-Davidson faisaient partie du paysage des artères de la capitale. En 1975, il vient en France pour des études supérieures de lettres. S�€�ensuivront cinq années � Strasbourg, ville académique s�€�il en est, pour combler une déficience culturelle qui n�€�a que trop duré sous la férule du «� Soleil des Aryens� », Mohammad Reza Pahlavi.
Le raz-de-marée populaire se déclenche en 1979. Ce seront ses dernières vacances estivales avant une longue rupture avec le pays. Il quitte Téhéran alors que les chars de l�€�armée impériale sont encore postés dans les rues pour faire respecter le couvre-feu. On connaît la suite� : prise du pouvoir par l�€�ayatollah Khomeyni, proclamation de la République islamique. S�€�ensuit un exil d�€�une dizaine d�€�années au cours desquelles il faudra mener � terme ses études, puis entrer dans la vie active. Il choisit le journalisme. Oubliés les rêves d�€�enseignement des belles-lettres � l�€�université de Téhéran.
Une décennie plus tard, c�€�est le voyage du retour, avec la ferme intention de redécouvrir les richesses du pays, province par province. L�€�Iran �€“ qui fait peur � l�€�Occident �€“ ne se vend pas dans les rédactions des magazines. Alors Reza Afchar Nadéri fera des «� archives� », dans l�€�attente de temps meilleurs.
Les visites des régions s�€�enchaînent� : les rives de la mer Caspienne, le golfe Arabo-Persique, Kerman avec la fantomatique cité de Bam, la ville désertique de Yazd, le Fars, berceau des rois perses avec Chiraz et Persépolis, la ville sainte de Qôm�€� Des milliers de kilomètres au cours desquels se dévoilent � la fois les visages fascinants du pays mais aussi une identité iranienne toute faite de paradoxes� : la modernité en marche sous des dehors les plus conservateurs.
Après une décennie d�€�allers-retours entre Paris et Téhéran advient le premier véritable reportage� : une importante commande du magazine Trek est consacrée aux deux grands déserts iraniens, le Dasht-e Kevir et le Kevir-e Lout, ainsi qu�€�au volcan sacré Demavand. Il s�€�agit l� d�€�un long périple � travers villes de sable et somptueuses capitales historiques.
Commenter rester persan� ? Trente-quatre ans après, le photojournaliste a-t-il fait le tour de la question� ? L�€�Iran, selon ses interlocuteurs occidentaux, ceux de la presse, les organisateurs de voyages, les simples routards ou voyageurs éclairés est une destination qui ne cesse de fasciner mais aussi de prendre � contre-pied les idées reçues. Peut-être surprendra-t-elle encore dans les toutes prochaines années� ? C�€�est l�€�occasion de faire le point avec un enfant du pays, ayant désormais en France de multiples racines� : l�€�âme de Hâfez et la langue de Molière. Pour en parler avec ceux qu�€�attire l�€�Iran.




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