Collection « Petite philosophie du voyage »

  • Défis de la course (Les)
  • Écho des bistrots (L’)
  • Quête du naturaliste (La)
  • Instinct de la glisse (L’)
  • Vertiges de la forêt (Les)
  • Voyage en famille (Le)
  • Tao du vélo (Le)
  • Parfum des îles (Le)
  • Appel de la route (L’)
  • Bonheurs de l’aquarelle (Les)
  • Euphorie des cimes (L’)
  • Malices du fil (Les)
  • Ivresse de la marche (L’)
  • Force du silence (La)
  • Secret des pierres (Le)
  • Frénésie du windsurf (La)
  • Prouesses de l’apnée (Les)
  • Vie en cabane (La)
  • Fureur de survivre (La)
  • Art de la trace (L’)
  • Voyage dans l’espace (Le)
  • Ronde des phares (La)
  • Frisson de la moto (Le)
  • Légèreté du parapente (La)
  • Poésie du rail (La)
  • Hymne aux oiseaux (L’)
  • L’Engagement humanitaire
  • Grâce de l’escalade (La)
  • Temps du voyage (Le)
  • Vertu des steppes (La)
  • Facéties du stop (Les)
  • Cantique de l’ours (Le)
  • Esprit du geste (L’)
  • Écriture de l’ailleurs (L’)
  • Rythme de l’âne (Le)
  • Chant des voiles (Le)
  • Liberté du centaure (La)
  • Tour du monde (Le)
  • Fièvre des volcans (La)
  • Extase du plongeur (L’)
  • Tentation du jardin (La)
  • Vie à la campagne (La)
  • Murmure des dunes (Le)
  • Goût de la politesse (Le)
  • Caresse de l’onde (La)
  • Magie des grimoires (La)
  • Audaces du tango (Les)
  • Simplicité du kayak (La)
  • Voyage immobile (Le)
  • Attrait des gouffres (L’)
  • Soif d’images (La)
  • Mémoire de la Terre (La)
  • Enchantement de la rivière (L’)
  • Prodige de l’amitié (Le)
  • Promesse de l’envol (La)
  • Mystères du vin (Les)
  • Religion du jazz (La)
  • Charme des musées (Le)
  • Triomphe du saltimbanque (Le)
  • Sortilèges de l’opéra (Les)
  • Âme de la chanson (L’)
  • Sérénité de l’éveil (La)
  • Arcanes du métro (Les)
Couverture
Voyage satellitaire :

« Je me souviens avec émotion de la première fois que j’ai lancé le logiciel Google Earth, qui permet l’exploration du globe à travers des images satellite enfin démocratisées. Soudainement apparaissait à l’écran une petite boule bleue flottant dans l’espace ! Un clic de souris, et voilà la planète tournant, révélant les continents… Et l’usage de la molette de zoom nous précipite vers sa surface, révélant toujours plus de détails. Avant d’avoir repris ma respiration, j’étais plongé dans l’examen du relief des îles Shetland ou l’inventaire des bateaux amarrés dans le port de Sullom Voe… Que d’heures passées à explorer des zones lointaines ou proches, sous un autre angle ! Depuis l’espace, rien de “réel” n’échappe au regard de la technologie. Le monde se révélait dans sa finitude et, par conséquent, sa fragilité. Plus tard est arrivé Google Street View, qui me ramenait brutalement au niveau du sol pour explorer les rues et routes du monde. Les immeubles apparurent sur mon écran comme si j’évoluais, sans le stress de la circulation, sur les avenues des métropoles. Et quelle surprise quand, après avoir suivi un bus dans São Paulo, à un carrefour, la météo et les couleurs changeaient d’un coup, car les prises de vue avaient été réalisées un autre jour ! Ce n’est pas une ville que je découvrais, mais plusieurs. Et je m’arrêtais souvent parce qu’un détail m’intriguait : ici, l’action d’un homme assis près de sa fenêtre ouverte semblait insolite. Là, deux magasins côte à côte paraissaient se faire une guerre de prix et de réputation. Ici encore, un panneau de signalisation indéchiffrable.
“Virtuel !” crient les puristes. Peut-être. Mais ces souvenirs ont un impact sur ma connaissance du monde, comme c’est le cas de tout savoir, vrai ou faux. Il y a peu, je lisais The Wrong Side of Goodbye de Michael Connelly. Au détour d’un paragraphe, l’auteur évoque la cathédrale Saint Vibiana de Los Angeles. Je dus poser le livre un instant, ne comprenant pas l’afflux soudain d’une image précise : une vaste salle garnie de tables rondes, aux nappes roses et à la vaisselle impeccablement dressée. De part et d’autre s’élevaient des arches élégantes, surmontées d’une galerie fenêtrée, le tout baigné dans une lumière indirecte, mise en scène délicate exprimant le luxe et la sérénité. Essayant de retracer la généalogie de cette vision incongrue, je mis peu de temps à me rappeler que j’avais exploré les rues de Los Angeles, près du centre historique de Bunker Hill, et qu’intrigué par un bâtiment blanc d’architecture italienne, situé à une encablure de Little Tokyo et de la mairie, j’en avais fait la visite virtuelle, goûtant le contraste avec les bâtiments contemporains et fonctionnels des environs. Le parc ombragé attenant m’avait même semblé idéal pour une promenade méditative ou une réception de mariage. Puis une recherche avancée m’avait permis de trouver non seulement l’histoire du bâtiment mais également un lien vers l’organisme qui gère cette église désacralisée. C’est là, en guise de publicité pour les événements corporate ou les mariages qu’il était désormais possible d’y organiser, que je trouvai les photos qui s’étaient si soudainement imposées depuis ma mémoire.
Bien sûr, cette expérience n’est pas complète : sans doute ne puis-je qu’imaginer les bruits de la rue et de la circulation sur South Main Street. À l’époque de ma première visite, les images satellite n’indiquaient pas le garage à voitures sur six niveaux qui flanque désormais l’église, même si l’exploration par Street View permettait déjà d’y voir un grand chantier. Il est probable aussi que je n’arrive pas à me faire une idée précise de la température en juin, ou de la saveur du vent balayant la ville polluée. C’est regrettable, cette expérience tronquée, mais à ce niveau, au moins, je me contente du verre à moitié plein. Ce que d’autres ont exploré, je peux en accepter des retombées partielles. »
(p. 40-43)

Examen de conscience (p. 30-34)
Le syndrome du voyageur (p. 61-64)
Extrait court
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