Collection « Sillages »

  • Treks au Népal
  • La 2CV vagabonde
  • Ísland
  • Habiter l’Antarctique
  • Cavalières
  • Damien autour du monde
  • À l’ombre de l’Ararat
  • Moi, Naraa, femme de Mongolie
  • Carpates
  • Âme du Gange (L’)
  • Pèlerin de Shikoku (Le)
  • Ivre de steppes
  • Tu seras un homme
  • Arctic Dream
  • Road Angels
  • L’ours est mon maître
  • Sous les yourtes de Mongolie
  • Cavalier des steppes
  • Odyssée amérindienne (L’)
  • Routes de la foi (Les)
  • Aborigènes
  • Diagonale eurasienne
  • Brasil
  • Route du thé (La)
  • Dans les pas de l’Ours
  • Kamtchatka
  • Coureur des bois
  • Aux quatre vents de la Patagonie
  • Siberia
  • Sur la route again
  • À l’écoute de l’Inde
  • Seule sur le Transsibérien
  • Rivages de l’Est
  • Solitudes australes
  • Espíritu Pampa
  • À l’auberge de l’Orient
  • Sans escale
  • Au pays des hommes-fleurs
  • Voyage au bout de la soif
  • Errance amérindienne
  • Sibériennes
  • Unghalak
  • Nomade du Grand Nord
  • Sous l’aile du Grand Corbeau
  • Au cœur de l’Inde
  • Pèlerin d’Orient
  • Pèlerin d’Occident
  • Souffleur de bambou (Le)
  • Au vent des Kerguelen
  • Volta (La)
  • Par les sentiers de la soie
  • Atalaya
  • Voie des glaces (La)
  • Grand Hiver (Le)
  • Maelström
  • Au gré du Yukon
Couverture
Une vie à la campagne :

« De ce côté du fleuve commence un autre monde, où l’asphalte laisse place à des routes en terre défoncées. Sotintsy apparaît dans un nuage de poussière. Le village s’étend tout en longueur. Partout ce ne sont que maisonnettes en bois entourées de jardins potagers et de serres. Nous accusons chaque nid-de-poule. “Mais ça, ce n’est rien, Devouchki, dit en riant Vera. En mai, au moment de la débâcle, lorsque la Lena sort de son lit, d’énormes flaques de boue bloquent les routes et isolent les villages, quand ils ne sont pas tout simplement inondés. Là, c’est dur !”
Les fermes se succèdent. Des vaches paissent tranquillement le long des barrières. Sur le bord de la route, le squelette d’un animal mort gelé rappelle que la température descend jusqu’à – 55 °C, parfois plus bas encore.
La voiture s’arrête devant une minuscule isba vert anis cachée par une clôture en planches. Dans le jardin, déposés là comme par erreur, une grosse moto rouge, un vieux tracteur, un fauteuil, une antenne satellite. Près du khoton, une étable faite de rondins et de terre dont les murs inclinés conservent mieux la chaleur, quelques vaches somnolent. Après que nous avons ôté nos chaussures, Vera nous fait entrer dans une petite pièce sombre. Un homme d’une cinquantaine d’années, le visage rond et mangé par de grosses lunettes nous accueille. Vera nous présente Vania, son deuxième mari. Affalés sur un vieux canapé de velours marron, un jeune garçon et une fillette semblent hypnotisés par un film d’horreur. “Je vous présente ma nièce, qui est venue passer les vacances à la maison.” L’adorable gamine au regard frondeur nous regarde, intimidée, avant de retourner à ses monstres cathodiques. Genia, le fils cadet de Vera, nous salue d’un large sourire. Collées à la télévision, des étagères coupent en deux la pièce et laissent entrevoir un bureau, un ordinateur, quelques livres, une banquette. Derrière une fine cloison ajourée, un lit envahit la chambre minuscule. Au centre de la maisonnée, les murs en briques du poêle à bois, allumé matin et soir en hiver, permettent de garder une température agréable. Et les toilettes ? Dehors, au fond du jardin. Au-delà de – 20 à – 30 °C, un pot de chambre fait l’affaire.
Le jour semble ne jamais vouloir disparaître mais Vera tombe de sommeil. Cette nuit-là, elle nous laisse sa chambre. Nous nous tassons dans la maison de poupée. Genia dormira avec nous sur un lit d’appoint. Le couple et la petite fille occuperont le canapé-lit du salon.
Six heures. Le réveil n’a pas sonné. L’habitude suffit. Vera nous secoue gentiment. C’est l’heure de la traite. La lourde porte du khoton claque silencieusement. Une ampoule éclaire faiblement l’intérieur. La lumière orangée est filtrée par la buée et la chaleur douceâtre qui se dégagent de la gueule des bêtes. Une odeur entêtante de bouse se colle aussitôt aux pores de la peau. Une poule, dérangée par Vania qui nettoie le sol en rondins à grands coups de pelle, volette quelques instants et se pose sur les os saillants d’un veau. Vera s’installe sur un tabouret pour traire une à une les cinq vaches qui ont passé tout l’hiver enfermées dans cette baraque de bois et de terre. Un travail dur, que la plupart des villageois ne veulent plus faire. Mais un geste naturel pour Vera, vétérinaire de formation, qui bien avant d’entreprendre des études supérieures aidait financièrement sa mère en trayant les vaches au sovkhoze. Son mari et elle produisent 5 tonnes de lait par an, avec quoi ils confectionnent beurre, crème et fromage qu’ils donnent en grande partie à la famille citadine de Vera. Elle plonge sa main dans une alcôve cachée de l’étable et en sort quelques œufs tout frais qu’elle ira vendre plus tard au village. “Maintenant, sortez les filles, sinon, vous n’arriverez jamais à vous débarrasser de l’odeur”, nous conseille-t-elle en riant.
Dehors, le soleil se lève, enveloppant le village d’une douce atmosphère rosée. Pas un bruit ne vient troubler le calme matinal. Quelques nuages de fumée s’élèvent au-dessus des cheminées. Le village se réveille. »
(p. 57-59)

L’étrange monsieur Panikarov (p. 137-141)
Épilogue (p. 268-270)
Extrait court
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