Collection « Sillages »

  • Treks au Népal
  • La 2CV vagabonde
  • Ísland
  • Habiter l’Antarctique
  • Cavalières
  • Damien autour du monde
  • À l’ombre de l’Ararat
  • Moi, Naraa, femme de Mongolie
  • Carpates
  • Âme du Gange (L’)
  • Pèlerin de Shikoku (Le)
  • Ivre de steppes
  • Tu seras un homme
  • Arctic Dream
  • Road Angels
  • L’ours est mon maître
  • Sous les yourtes de Mongolie
  • Cavalier des steppes
  • Odyssée amérindienne (L’)
  • Routes de la foi (Les)
  • Aborigènes
  • Diagonale eurasienne
  • Brasil
  • Route du thé (La)
  • Dans les pas de l’Ours
  • Kamtchatka
  • Coureur des bois
  • Aux quatre vents de la Patagonie
  • Siberia
  • Sur la route again
  • À l’écoute de l’Inde
  • Seule sur le Transsibérien
  • Rivages de l’Est
  • Solitudes australes
  • Espíritu Pampa
  • À l’auberge de l’Orient
  • Sans escale
  • Au pays des hommes-fleurs
  • Voyage au bout de la soif
  • Errance amérindienne
  • Sibériennes
  • Unghalak
  • Nomade du Grand Nord
  • Sous l’aile du Grand Corbeau
  • Au cœur de l’Inde
  • Pèlerin d’Orient
  • Pèlerin d’Occident
  • Souffleur de bambou (Le)
  • Au vent des Kerguelen
  • Volta (La)
  • Par les sentiers de la soie
  • Atalaya
  • Voie des glaces (La)
  • Grand Hiver (Le)
  • Maelström
  • Au gré du Yukon
Couverture

Franck, www.francksbooks, le 4 novembre 2019 :
« J’ai connu Guillaume Chérel avec un roman qui avait eu un certain succès en 2016 : Un bon écrivain est un écrivain mort. Je n’avais pas été emballé plus que ça par ce titre, mais je m’étais promis de revenir à un autre texte de cet auteur parisien. Ma passion pour l’Ouest américain et la perspective de lire un road-trip sur les traces de Kerouac me guida tout naturellement vers ce récit de voyage, quelques années plus tard. C’est ainsi que je découvris Sur la route again, un bouquin pas comme les autres, un texte drôle, fantaisiste, attachant, à l’image de son auteur, si j’en crois les quelques contacts que j’ai pu avoir avec lui. Quelle idée traversa la tête de ce grand fou de Chérel pour se frotter à un monstre sacré tel que Kerouac ? Était-ce un hommage, une expérience personnelle, un voyage initiatique ? Il me semble, à la lecture de ce bouquin foutraque et passionnant, qu’il s’agissait un peu de tout ça. Car oui, ce livre est passionnant et je l’ai lu quasiment d’une traite. L’écriture de Chérel est aérienne et on a souvent le sentiment que ce bouquin a été écrit dans l’urgence, au fond d’un bus Greyhound ou sur le béton d’un trottoir californien. N’étant pas un grand fan de Kerouac, j’ai découvert nombres d’anecdotes avec ce titre. J’ai beaucoup ri également, ri en lisant les déconvenues de Chérel, ses galères de voyage, ses galères d’argent et sa personnalité enthousiaste malgré les affres d’un périple éreintant. J’ai aussi été ému lorsqu’il évoque sa gosse et la difficulté d’être un grand enfant idéaliste dans un monde dominé par des gens convenables et responsables. Attachant vous dis-je, et je ne le répèterai jamais assez. Attachant, vivant et sans compromis, comme son auteur.
J’achète ? : Oui, assurément. Ce dialogue/monologue entre deux auteurs que cinquante longues années séparent est vif, riche d’enseignements et jamais ennuyeux. La personnalité de clochard céleste de Chérel, sa liberté, y sont pour beaucoup et ce voyage sur les traces du grand écrivain est assurément un excellent moment de lecture. »


Nathalie Glorion, www.lespassionsdechinook.com, le 23 octobre 2013 :
« Je suis tombée par hasard sur ce livre en parcourant les nouveautés à venir chez Transboréal, ma maison d’édition favorite. En faisant des recherches sur l’auteur, je me suis dit que ce livre allait sortir des sentiers battus, et cela me plaisait bien. Même si je n’ai pas encore lu toute son œuvre, je suis une grande fan de Jack Kerouac et de la Beat Generation en général. J’aime beaucoup aussi la route, les récits de voyage root ; donc ce livre ne pouvait que me plaire.
En premier lieu, je trouve la couverture très belle. C’est d’ailleurs grâce à elle que ce livre m’a tapé dans l’œil. De New York à Mexico via Chicago, Des Moines, Denver, S. F. et L. A., Guillaune Chérel (re) part sur les traces de Kerouac. Il traverse les États-Unis pour vivre un
replay du Sur la route du grand Jack.
J’ai été séduite par l’écriture de l’auteur dès les premiers mots. Il n’était pas encore parti que je savais déjà que je le suivrais jusqu’au bout de sa route. La construction est assez originale pour un récit de voyage, car Cherel autorebaptisé “Cherouack” pour l’occasion, a rédigé ce livre en s’adressant à Jack
himself ! Guillaume parcourt le même itinéraire que Kerouac. Pour ce faire, il choisit les bus Greyhound pour traverser le pays, ce qu’il fait à toute allure d’ailleurs, car il est pressé d’arriver à L. A. C’est la partie du récit qui m’a le moins captivée, il en est de même pour l’auteur. Il “vomit” cette ville, il s’enlise à L. A., ville qu’il déteste, entre picole et homeless. Mais qu’il a du mal à quitter pour partir au Mexique où le récit reprend de la vigueur.
Outre le voyage agréable à suivre, j’ai appris beaucoup de choses sur Kerouac tout au loin de ce récit et cela m’a captivée ! J’ai eu aussi l’immense plaisir de trouver dans ce livre un autre grand Jack : Jack London. Ce que j’ai beaucoup apprécié (j’adore cela en fait) aussi dans ce livre, c’est que l’on y croise beaucoup de références littéraires et cinématographiques : Fante, Hemingway, London, Kerouac
(of course), Burrough, Harrison, Miller… que du bon quoi !
J’ai tourné la dernière page de ce livre avec une pile de livres à me procurer, longue comme le bras. À 20 ans, Guillaume est déjà parti sur la route de ces deux grands. Il en a écrit
Jack London, Le mangeur de vent qu’il me faut absolument ! Ah non, Monsieur Chérel ! mon livre je le garde et je le conseille à tous les amateurs de récit roots. Le seul petit reproche, peut-être, c’est que j’aurais aimé trouver quelques photos de son périple. »

Matthieu Delaunay, La Semaine du Pays basque n° 1037, du 23 au 29 août 2013 :
« II en faut vraiment, du cran, pour s’attaquer à Jack Kerouac, l’un des maîtres de la littérature du XXe siècle. Car celui auquel beaucoup d’écrivains s’identifient – pour tenter de défendre la totale et indigente platitude de leurs propos commis sur de nombreuses pages, lors même qu’ils sont sans talent et alcoolisés à souhait dans les rades chic des beaux quartiers parisiens – n’est pas un garçon facile à suivre. C’est pour cela qu’il fallait que le type qui se jette à sa poursuite (peine perdue a-t-on envie de dire, Kerouac étant déjà mort), soit lui aussi difficile à pister.
“Mon voyage a vraiment commencé, à la manière de Blaise Cendrars, en mêlant rêve et réalité, dans le train pour New York, direction Penn Station.” Nous voilà donc dans le “Tube” de la grosse pomme, en compagnie de Guillaume Chérel, quadra de presque deux mètres qui a entrepris un voyage pour le moins osé : refaire la route de Jack Kerouac. Tandis que les roues métalliques martèlent régulièrement le ballast du rail new-yorkais dans une lumière blafarde de néons clignotants, les yeux écarquillés, Chérel regarde par la fenêtre. Mais sous la terre, il fait noir. Noir comme l’était Kerouac, en dépit d’une vitalité lumineuse qui l’a propulsé avec des compagnons foutraques dans de grands “OOOOOh !”, des “AaaaaaaHHH !”, et des
“Fucking rats !” aux quatre coins des États-Unis. Noir aussi comme doit l’être un peu au fond Guillaume Chérel.
De New York, on traverse avec l’auteur le pays entier en quelques jours, dans des bus peuplés de petites gens qui ont souvent beaucoup à dire. Avec lui on découvrira les rues pleines de charme de San Francisco, et les nuits pleines de drogue de Los Angeles. Et même si Guillaume Chérel a tendance parfois à se prendre au sérieux dans le fond, sa forme le sauve. Rythmé, enlevé, précis, concis, lancinant, effarant, surprenant, énervant, ce bouquin est une réussite.
Le voyage de Kerouac était initiatique, on pouvait craindre que le
remake de Guillaume Chérel se transforme en redite. Et si l’on trouve dans ces pages quelques idées mal peignées, quelques forfanteries illégitimes et quelques journées inutiles, notre “Kerouaco-dépendant” livre ici une bien belle copie qui prend toute sa puissance quand elle nous entraîne dans les tréfonds littéraires et biographiques de ce brun ténébreux au visage d’ange et au cerveau fécond. C’était donc la freaking folie à Los Angeles, la beauté à San Francisco et le coup de foudre à Mexico. 330 pages pleines de souffle et de bizarrerie. 330 pages qui rebondissent, tombant rarement bien bas et montant souvent assez haut.
“J’ai découvert Kerouac, peu de temps après la mort de mon père. Ma vie ne me ressemblait pas. Vous savez, comme ces nuits où l’on se réveille à 3 heures du matin, sans pouvoir se rendormir. On a toujours l’impression d’avoir raté sa vie à 3 heures du matin.”
En terminant ce livre un soir d’insomnie dans la seconde partie de la nuit, on aura compris que les impressions sont parfois trompeuses. »


Thomas Galley, La Bauge littéraire, le 23 août 2013 :
« Le moins que je puisse dire, c’est que j’ai aimé faire un bout de chemin en compagnie de Guillaume Chérel. Et des ombres qui lui ont tenu compagnie. Celle de Jack, évidemment, mais aussi celles de Neal Cassady et de la bande entière des beatniks, tout comme celles encore qui sont sorties de sa propre jeunesse, de son premier voyage aux States et de toutes les rencontres qu’il a pu faire en parcourant ce pays énorme qui ressemble à lui tout seul à un continent. Parce que cela permet, entre autres, de profiter de ses lectures, et je peux vous assurer que le nombre de livres qu’il a dû engloutir en cours de route n’est pas négligeable. Parce qu’on pénètre avec lui dans des endroits qu’on n’aurait sans doute jamais vus. Ou sur lesquels on aurait porté – forcément – un autre regard que celui qu’il laisse tomber du haut de ses presque deux mètres. Et j’aime ça, me glisser dans la peau d’un autre et voir le monde à travers ses yeux. Guillaume Chérel, il sait faire profiter ses lecteurs de ses expériences, leur peindre les scènes qu’il a pu voir au cours de son trajet, les inclure, après coup, dans ses conversations, leur montrer les coins où il a pu pénétrer. Parfois, c’est assez intense. C’est ainsi qu’on voit défiler l’armée des sans-abri (les homeless, comme il préfère dire) côtoyant les riches, de New York à Los Angeles, et qu’on participe, peu après, aux parties dans les villas de L. A. ou sur les plages d’East Hampton. »

Nathalie Kermorvant, Le Télégramme n° 809, le 11 août 2013 :
« Guillaume Chérel nous emmène sur les traces de Jack Kerouac, un des auteurs américains les plus importants du XXe siècle, considéré comme l’emblème de la génération Beatnik. Le premier, qui a parcouru le monde, entend faire sienne “La Route” du second. Sillonnant les États-Unis sans (presque) un sou en poche, comme un hobo, il trace sa “Route” à lui, sorte de remix de l’originale, avec en filigrane les mots et l’esprit de Jack Kerouac. Les deux écrivains ne discutent-ils pas d’ailleurs entre eux ? Avec un regard décalé, Guillaume Chérel, à travers un style haché mêlant récit, dialogue virtuel et souvenirs, propose un véritable sample du périple de Kerouac : plus rapide, plus moderne, dans un monde dont les valeurs ont changé. »

HollyDay, www.amazon.fr, le 11 juillet 2013 :
« Sur les traces de J. Kerouac, l’auteur nous entraîne de New York au Mexique via la Californie, empruntant cette même route qu’avait prise le porte-drapeau de la beat generation des années 1950.
En bon Gémeaux, Guillaume Cherel se dédouble. Une partie de lui-même rêve à “frère Jack” et lui parle comme le ferait un enfant qui s’invente un copain imaginaire, l’autre est dotée de l’esprit d’une caméra, elle avale et enregistre les images d’une Amérique en décrépitude :
homeless hantant de sordides gares routières, voyageurs fauchés, éreintés, se faisant engueuler par les chauffeurs des Grey Line bornés et ravagés, noceurs-branleurs cocaïnés des soirées où-il-faut-absolument-aller d’un Hollywood qui transpire la décadence et s’asphyxie dans un vide sidéral où les étoiles ne brillent plus depuis longtemps. Guillaume Cherel est doué de la parole écrite, telle est sa plume, même si parfois, il lui arrive de se répéter (côté écho des Gémeaux ?).
Au bout du périple kerouakien, les pieds et les jambes de Guillaume se mettent à doubler de volume. Voyager comme un SDF, n’est-ce pas gonflant à la fin ? semble vouloir dire le corps de cet éternel adolescent à sa bande de copains invisibles, écrivains dans les nuages. Guillaume Cherel est un auteur vraiment touchant que l’on aimerait consoler de son refus de grandir malgré son mètre quatre-vingt-treize.
À lire absolument quand on a une âme de nomade… Ou pour se la découvrir en cours de route. »


Fabrice Drouzy, Libération n° 9998, les 6-7 juillet 2013 :
« Guillaume Chérel est un peu fou. C’est un fait qu’il faut connaître pour apprécier ce livre. Déjanté, enthousiaste, extraverti, solaire, intarissable… À 20 ans, il est tombé amoureux d’une Bretonne prénommée Stéphanie et de l’auteur américain Jack Kerouac, figure emblématique de la Beat Generation. Le premier amour n’a pas eu de suite. Le second le tient toujours au cœur et au corps trois décennies plus tard. C’est le livre de cette passion qu’il livre dans Sur la route again, road book inspiré sur les pas de son héros, à travers l’Amérique d’Obama.
Des semaines en stop et en bus Greyhound, de New York à Mexico, en passant par Chicago, Des Moines, San Francisco, Los Angeles… Quatre mille kilomètres, presque autant de rencontres, de portraits, de paysages et de descriptions hallucinées dans une Amérique en campagne électorale, sur le point d’élire le premier président noir de son histoire – le voyage se déroule en 2008. Un pays décrit avec lyrisme et empathie, mais sans mensonges. Les “clochards célestes” et autres “vagabonds des étoiles” de Kerouac sont ici des
homeless bien réels, rats humains shootés au crack, vivant cachés dans les parkings ou sous les ponts. Décomplexé et gentiment mégalo, Guillaume Chérel ne se contente pas de suivre le grand Jack et d’évoquer sa présence. Non, il est avec lui : “J’ai vu Jack et Neal traverser la rue. Je dis bien vu… pas cru voir ! Kerouac et Cassady étaient jeunes, beaux, bronzés. […] Ils portaient des tee-shirts blancs, des chaussures de montagne et des jeans délavés. Des p’tits Marlon Brando, époque Tramway, pas Apocalypse…” Un Kerouac que Chérel apostrophe, interpelle, réveille à longueur de pages, dans une joute sans peine. Sur la route again. »

Franck-Olivier Laferrère, http://salon-litteraire.com, juillet 2013 :
« Non, non, je ne le crois pas, contrairement à ce qu’écrit le journaliste de Libé dans sa chronique, Guillaume Chérel n’est pas fou. Non. Ou alors, seulement au sens ou nous aimons que cela soit dit, comme ça l’était quand nous étions petits et que nous nous faisions remarquer en classe, hors cadre, osant ce qu’aucun autre n’aurait osé, rétorquant, bravaches, aux invectives professorales avec la morgue des petits cons persuadés que leur vie est, et sera toujours, ailleurs, hors du troupeau des bêtes laineuses qui passent des champs à l’étable et de l’étable à la tonsure avec la mollesse obéissante des renonçants… Donc non, Guillaume Chérel n’est pas fou, ou seulement dans la définition un peu glamour de cette fureur de vivre qui conduit certains d’entre nous à brûler des vaisseaux qu’aucun autre n’abandonnerait sans être sérieusement menacé de mort. Mais dans le fond, n’est-ce pas ce qui se produit pour tout “furieux vivant” qui se voit octroyer une place où il pourrait s’installer et regarder tranquillement défiler sa vie jusqu’à la tombe ? Ce genre de perspective ne claque-t-il pas dans leur ciel comme la plus absolue des menaces de mort ?
La vie est dans le mouvement, la route est ce mouvement et donc ce qui seul peut décemment être qualifié de Vie (avec une majuscule) est dans et sur la route. Quel qu’en soit le prix. Sauf que chez Guillaume Chérel, ce postulat relativement simple dans l’énoncé (je dis bien dans l’énoncé parce que, dans les faits, c’est toujours une autre histoire) se complique quelque peu de sa volonté farouche d’être aussi un bon père.
Nombreux sont ceux qui ont renoncé devant l’insupportable de cette tension quasi schizophrène, choisissant l’une ou l’autre de ces propositions que tout semble désigner comme antinomiques, qui explique pourquoi les bons pères ou assimilés (fac-similés ?) sont bien plus nombreux que ces autres déclarés fous à bon compte et à la satisfaction de tous. Admirablement fou, c’est ainsi que la société construit le paradigme sur lequel elle se fonde et croît de génération en génération.
Une majorité molle, plus ou moins en accord avec cette idée du renoncement nécessaire et quelques autres, quelques météores irradiant les cieux de leur courte et intense existence à laquelle ils auront tout sacrifié… Et cela vaut pour les hommes comme pour les femmes… Guillaume évoque les grandes figures qui l’ont guidé depuis ses débuts dans l’âge adulte, les frères Jack, Kerouac et London, Cendrars, auxquels, pour ma part, j’ajouterais également le Camus de
Jonas ou l’artiste au travail, cette nouvelle écrite après-guerre alors qu’il logeait aux frais de Gallimard dans un appartement tout en enfilade quelque part dans le VIIe arrondissement et dans laquelle il raconte l’“impossibilité” quasi consubstantielle à l’artiste de pouvoir assumer sa famille…
Sur la route again, cette route qu’il a voulu reprendre de toutes ses forces, vingt ans après son dépucelage, arrachant le soutien de la fondation Stendhal pour y parvenir, Guillaume y est souvent seul, seul au milieu de la foule des autres, seul chez ces “amis” qui l’hébergent et qui, plus ou moins vite, ne le supportent plus, lui et sa grande gueule, lui ce miroir de près de 2 mètres qui leur rappelle combien ils sont statiques et peut-être presque morts quand lui s’acharne à vivre, à exister plutôt que vivre, écrit-il plusieurs fois au cours de ce récit, qui s’échine à rattraper le troupeau de chevaux au galop qu’évoquait Cendrars… Ou Neal Cassady, je ne sais plus… Il est seul et parle à Jack, il est seul et écrit sur son blog ouvert sur le site de Libé et sur lequel une horde de gremlins (ce que d’aucuns appellent des “trolls”) le houspille tout au long de sa route…
Et puis il écrit à Louna, sa fille, une longue et belle lettre comme les pères devraient en écrire plus souvent à leur fils/fille… Une déclaration d’amour comme on aimerait, peut-être, qu’il y en ait eu un au moins, de nos deux parents, pour nous en écrire une semblable… Une lettre sans fard pour qui le connaît un peu…
Sans fard, son récit l’est, du début jusqu’à la fin, et il bat la mesure de la route comme un boxeur joue de la salope, son job pour tenir à distance l’adversaire… Mais la route est un corps à corps, dans les cordes, ou les fauteuils inconfortables des bus Greyhound qui le transportent des jours durant à travers l’Amérique… Une Amérique qui n’a plus rien de commun avec celle de Jack et Neal, une Amérique de “zombies” qui n’ont rien de
Walking Dead ou World War Z… À moins qu’il n’y ait que ça à entendre dans cette invasion de zombies sur les écrans depuis quelques années, cette peur qui hante tout Américain de finir underground, l’un de ces rats, ces fucking rats comme nous désigne tous Salvador le Français de L. A. qui passe son temps libre dans le resto de Robert de Niro… L. A., cette ville sangsue qui l’accroche, qui le scotche a-t-on envie d’écrire, au fil des pages et des bitures qui s’enchaînent… Guillaume veut fuir, mais L. A. tient bon… Jusqu’à ce qu’il s’en arrache, enfin… Pour reprendre sa route vers son vrai but, Mexico… Parce que Guillaume est un Mexicain, un brigand au teint mat dont “la tête est une forêt”, un Mexicain géant qui les dépasse tous de deux têtes comme le Bill Clancy des nouvelles de F. X. Toole, un brigand au grand cœur qui enrage devant la misère et ne trouve d’apaisement, un semblant tout au moins, presque paradoxalement, dans ce Mexique multicolore où l’on fête les morts et dézingue à tour de bras les vivants, pour la moindre histoire de cul ou de drogue… Et Guillaume de reconnaître que cette vie de misère à courir derrière ce fric qu’il a tant méprisé par le passé, est dure, de plus en plus dure avec les années qui passent, inexorable sablier du temps qui l’emportera à la fin, de toute façon, quelle que soit l’énergie qu’on aura déployée à lui résister… Mais c’est pourtant là qu’elle se niche, cette chienne de vie dont on ne veut rien lâcher, rien céder quitte à tout y laisser… Dans ce combat acharné, démesuré et perdu d’avance… Dans les accrocs, dans le “it” de cette morgue de sale gosse indomptable qu’il faudra finir par tuer pour qu’il la ferme enfin, une bonne fois pour toute, sa grande gueule. »

Frédéric Beigbeder, Le Figaro Magazine n° 21430-21431 des 28-29 juin 2013 :
« Qu’est-ce qui a changé depuis On the Road ? La route de Jack Kerouac vibrait au son du be-bop, s’enivrait de filles légères, d’alcool et de fumée sucrée. C’était en 1957, une époque d’accélération et de libération par la prose spontanée : ce livre était, dit joliment Guillaume Chérel, “une véritable autoroute de lettres”. Aujourd’hui les clochards sont moins célestes : on les définit par ce qu’ils ne possèdent pas (homeless). Guillaume “Chérouac” pense que “nous entrons dans une ère de ‘réensauvagement’”. Il croise la misère, la violence, l’alcool triste et le mal de dents. Il n’a pas assez d’argent pour jouer les hippies chic. Après la route 66, bienvenue dans la loose 2008 – la date de son aventure est aussi celle de la faillite de Lehman Brothers. Est-ce parce qu’il a choisi de voyager seul en bus Greyhound ? Kerouac utilisait Cassady comme muse, Chérel n’a pas d’alter ego pour l’inspirer. Il déprime au milieu des Blacks obèses, des portables qui sonnent et des enfants qui vomissent. Il apostrophe sans cesse Kerouac : Sur la route again est un récit au vocatif, une déclaration de jalousie adressée au cadavre d’une illusion. Son périple ressemble à une longue gueule de bois nommée crise économique : “Moi qui pensais voyager comme un hobo romantique, un vagabond des étoiles, sur les pas du roi des beatniks, j’ai vu les nouveaux damnés de la terre, errant dans les villes par centaines de milliers, tels des rats humains. »

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