Collection « Visions »

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Couverture
Niger :

« L’ours, nounours en peluche, parfois supplanté par le panda de même matière, continue plus que jamais d’endormir des générations d’enfants. Le lion règne sur la finance, le crocodile sur les textiles… emblèmes publicitaires chargés d’exciter des fantasmes de douceur, de puissance, de compétition. Il n’est pas étonnant alors que l’animal le plus étrange de la Création, la girafe, ait autant inspiré les peintres et les graveurs préhistoriques du Sahara. Et que ces créatures de deux à six mètres de haut stimulent toujours notre inconscient collectif comme notre imaginaire individuel. Peintes, gravées, quelquefois détourées à la façon des bas-reliefs, les girafes rupestres animent de nombreuses régions sahariennes. Certains sites même, dans l’Aïr par exemple, en comptent d’importantes concentrations gravées. Cela peut traduire leur présence en nombre dans le secteur et le fait qu’elles étaient aussi “bonnes à manger” que “bonnes à penser”. Plus que pour les zèbres, on observe chez la girafe actuelle, si on la considère dans le détail, une grande variabilité géographique et individuelle du dessin de la robe, un peu comme les empreintes digitales. Sa couleur fondamentale est blanc jaunâtre à brun, avec des taches jaune pâle à brun noir. Des sujets peuvent être blancs, noirs ou sans tache. Par divers artifices techniques, quadrillages de traits incisés, cupules piquées, martelées ou polies, les graveurs en ont rendu principalement trois sous-espèces : deux de girafe réticulée (Giraffa camelopardalis reticulata et Giraffa c. rothschildi) et une de girafe ponctuée (Giraffa c. tippelskirchi). Les peintures, en revanche, sont souvent d’une grande précision anatomique. Comment expliquer alors d’étonnantes fantaisies, totalement étrangères à la réalité du dessin des robes, comme les lignes contournées, par exemple sur une paroi du kori Tagueï ? Entre les pattes d’une girafe, le corps d’un anthropomorphe ovale est rempli d’un quadrillage. Il pourrait faire penser au dessin de la robe réticulée de cet animal. Non loin, sur une autre paroi, une girafe réticulée a été placée entre deux motifs gravés qui ressemblent à des grilles. Doit-on voir là une correspondance ou une association d’idées entre le pelage quadrillé et une grille entoptique, l’une des visions qui se produisent pendant un stade de la transe ? Dans ce cas, on pourrait déduire de l’association rupestre grille/girafe réticulée l’évocation d’un animal-esprit, dans la pratique du chamanisme. Il ne serait pas déraisonnable de penser que la société paléoberbère des “guerriers libyens”, à laquelle appartenaient les auteurs de ces gravures, avait des croyances animistes. Chez leurs descendants, les Touaregs actuels, un fonds de croyances semblables subsiste sous l’islam.
La girafe avait disparu d’Égypte vers 2500 ans avant notre ère, à cause de la sécheresse. Les antiques traditions d’échange et de commerce de ce pays avec ceux du sud permirent cependant sa réintroduction. Bien plus tard, elle voyagea jusqu’en Europe. En 1829, une girafe débarquait sur le port de Marseille, cadeau du vice-roi d’Égypte, le pacha Méhémet Ali, au roi de France, Charles X. Vêtue d’une cape imperméable avec capuchon, ses pattes étant lacées de sandales en cuir souple, elle marcha jusqu’à Paris, eut beaucoup de succès et mourut dix-huit ans plus tard au Jardin des Plantes où, promenée par Atir, son serviteur noir qui la tenait par une cordelette, elle avait coulé des jours paisibles… Maintes représentations de la girafe tantôt poursuivie avec des chars et chassée à la lance, tantôt si proche de l’homme qu’on la croirait apprivoisée, confirment sur les rochers du Sahara l’intérêt et même l’attachement qu’on lui a portés dès la fin du néolithique. Il est vrai que cette bête paisible, abondante réserve de nourriture, fut de tout temps une proie facile. Elle reste convoitée, moins pour sa viande que pour les crins de sa queue dont on fait des bracelets ! Dans l’Aïr nord-oriental, sur l’un des blocs gravés du kori Tagueï, véritable “vallée des girafes”, un grand archer tient par le cou un spécimen beaucoup plus petit que lui. Peut-être s’agit-il d’une très ancienne coutume qui s’est perpétuée jusqu’au XXe siècle, celle de capturer des girafons pour les élever. »
(p. 110-113)

Libye (p. 10-11)
Algérie (p. 94-95)
Extrait court
Extraits d’articles
La géologie du Sahara
L’adaptation des plantes au désert
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