Collection « Petite philosophie du voyage »

  • Défis de la course (Les)
  • Écho des bistrots (L’)
  • Quête du naturaliste (La)
  • Instinct de la glisse (L’)
  • Vertiges de la forêt (Les)
  • Voyage en famille (Le)
  • Tao du vélo (Le)
  • Parfum des îles (Le)
  • Appel de la route (L’)
  • Bonheurs de l’aquarelle (Les)
  • Euphorie des cimes (L’)
  • Malices du fil (Les)
  • Ivresse de la marche (L’)
  • Force du silence (La)
  • Secret des pierres (Le)
  • Frénésie du windsurf (La)
  • Prouesses de l’apnée (Les)
  • Vie en cabane (La)
  • Fureur de survivre (La)
  • Art de la trace (L’)
  • Voyage dans l’espace (Le)
  • Ronde des phares (La)
  • Frisson de la moto (Le)
  • Légèreté du parapente (La)
  • Poésie du rail (La)
  • Hymne aux oiseaux (L’)
  • L’Engagement humanitaire
  • Grâce de l’escalade (La)
  • Temps du voyage (Le)
  • Vertu des steppes (La)
  • Facéties du stop (Les)
  • Cantique de l’ours (Le)
  • Esprit du geste (L’)
  • Écriture de l’ailleurs (L’)
  • Rythme de l’âne (Le)
  • Chant des voiles (Le)
  • Liberté du centaure (La)
  • Tour du monde (Le)
  • Fièvre des volcans (La)
  • Extase du plongeur (L’)
  • Tentation du jardin (La)
  • Vie à la campagne (La)
  • Murmure des dunes (Le)
  • Goût de la politesse (Le)
  • Caresse de l’onde (La)
  • Magie des grimoires (La)
  • Audaces du tango (Les)
  • Simplicité du kayak (La)
  • Voyage immobile (Le)
  • Attrait des gouffres (L’)
  • Soif d’images (La)
  • Mémoire de la Terre (La)
  • Enchantement de la rivière (L’)
  • Prodige de l’amitié (Le)
  • Promesse de l’envol (La)
  • Mystères du vin (Les)
  • Religion du jazz (La)
  • Charme des musées (Le)
  • Triomphe du saltimbanque (Le)
  • Sortilèges de l’opéra (Les)
  • Âme de la chanson (L’)
  • Sérénité de l’éveil (La)
  • Arcanes du métro (Les)
Couverture
Un autre espace-temps :

« La bicyclette permet l’exploration du monde à vitesse humaine, ni trop lente pour qu’on se lasse, ni trop rapide pour qu’on soit frustré. Elle offre le compromis idéal entre progression et découverte. On s’en rend d’autant plus compte lorsqu’on croise des voyageurs qui ont choisi un moyen de transport différent. À Wanganui, en Nouvelle-Zélande, je venais de terminer une belle journée lorsque je rencontrai un Français qui voyageait en camping-car. L’endroit baignait déjà dans la douceur vespérale lorsqu’il arriva à mes côtés. Le jeune homme m’expliqua qu’il “faisait” les sites touristiques majeurs du pays dans le but de rédiger des comptes-rendus pour ses amis internautes. Il ajouta qu’il devrait revenir visiter plus tard, car il n’avait pas le temps cette fois-ci. Il me demanda conseil pour les jours suivants. Je lui suggérai de longer la rivière Wanganui, pour éviter la route principale et plonger dans le cœur et l’esprit du pays. Mais, paradoxalement, à lui qui roulait vingt fois plus vite que moi, le temps manquait.
À l’inverse, le cyclonomade possède ce bien si rare à notre époque où chaque minute est comptée. L’adage africain selon lequel les Occidentaux possèdent la montre et les Africains le temps peut s’appliquer sans aucun doute à l’amateur du voyage à vélo. Si la montre a disparu de son poignet, ce n’est pas pour une question esthétique mais bien parce que le temps ne lui importe pas ou peu. Son voyage est rythmé par le cycle naturel. La caresse du soleil qui baigne la tente le réveille ; son intensité le renseigne sur la météo. Lorsque l’astre s’apprête à disparaître derrière les montagnes en nimbant leur contour d’un halo, le cyclovoyageur se glisse sous son abri de toile. Il s’ensuit une nuit sans cauchemar, sans angoisse ni aucun trouble. Il rêve de pentes douces, de pluie fraîche ou de soleil, de rencontres et de sourires. Il ne vit plus à la cadence des horaires imposés par la société mais au rythme du soleil et des saisons. L’heure, le jour et les mois disparaissent de sa vie, le temps lui appartient, il devient un homme libre. La nature fait son œuvre sur son disciple. Ce n’est pas soumission mais plutôt accommodement. Plusieurs mois sont nécessaires pour parvenir à cet état, mais une fois arrivé à ce stade, on est au faîte de la plénitude. Les nuits sont ininterrompues et les réveils sans douleur. Le seul désir du cycliste est alors de repartir sur les routes pour continuer à vivre au diapason de son environnement. Le temps est aboli ; seul l’espace compte.
Après un voyage, le cyclonomade est parfois emporté par la nostalgie. Photos d’une région traversée, reportage radiophonique où l’on reconnaît des bruits de rue, magazine faisant sa une sur un pays connu… : mille détails lui rappellent sa vie d’errance. Lui reviennent en mémoire les odeurs, le froid matinal, la pureté d’un ciel, le sourire d’un commerçant. Son esprit s’égare dans la reconstitution d’événements marquants : l’éprouvante ascension de plusieurs jours entre Lima et La Oroya au Pérou, la journée ventée entre Taupo et Te Kuiti en Nouvelle-Zélande, la sortie du village de Kukës en Albanie, les lacets de la piste plongeant dans la vallée d’Howraman en Iran. Alors, l’envie de repartir le reprend, et il plonge ses yeux sur la carte qui domine son bureau. Son index vagabonde sur des routes inexistantes et son imagination suit son cours, libre de parcourir des terres encore inconnues. Le vélo attend sereinement. Du jour où il l’a remisé dans le garage ou la cage d’escalier, le voyageur sait que l’heure viendra où il repartira. Il ne s’est pas trompé. Conscient que la bicyclette façonne son être ou son couple, le cyclonomade repart très vite sur les routes avec l’espoir d’y trouver le bonheur escompté. Ainsi en va-t-il du tao du vélo : il promet la sagesse aussi bien aux amoureux en errance qu’au randonneur solitaire. »
(p. 86-89)

Ma fidèle compagne (p. 23-26)
Par le sang donné (p. 74-76)
Extrait court
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