Collection « Sillages »

  • Népal
  • La 2CV vagabonde
  • Ísland
  • Habiter l’Antarctique
  • Cavalières
  • Damien autour du monde
  • À l’ombre de l’Ararat
  • Moi, Naraa, femme de Mongolie
  • Carpates
  • Âme du Gange (L’)
  • Pèlerin de Shikoku (Le)
  • Ivre de steppes
  • Tu seras un homme
  • Arctic Dream
  • Road Angels
  • L’ours est mon maître
  • Sous les yourtes de Mongolie
  • Cavalier des steppes
  • Odyssée amérindienne (L’)
  • Routes de la foi (Les)
  • Aborigènes
  • Diagonale eurasienne
  • Brasil
  • Route du thé (La)
  • Dans les pas de l’Ours
  • Kamtchatka
  • Coureur des bois
  • Aux quatre vents de la Patagonie
  • Siberia
  • Sur la route again
  • À l’écoute de l’Inde
  • Seule sur le Transsibérien
  • Rivages de l’Est
  • Solitudes australes
  • Espíritu Pampa
  • À l’auberge de l’Orient
  • Sans escale
  • Au pays des hommes-fleurs
  • Voyage au bout de la soif
  • Errance amérindienne
  • Sibériennes
  • Unghalak
  • Nomade du Grand Nord
  • Sous l’aile du Grand Corbeau
  • Au cœur de l’Inde
  • Pèlerin d’Orient
  • Pèlerin d’Occident
  • Souffleur de bambou (Le)
  • Au vent des Kerguelen
  • Volta (La)
  • Par les sentiers de la soie
  • Atalaya
  • Voie des glaces (La)
  • Grand Hiver (Le)
  • Maelström
  • Au gré du Yukon
Couverture
Red River Woman :

« Le bus filait maintenant à travers les forêts épaisses de l’Iowa. À mes côtés, je ressentais la chaleur du corps de Red River Woman. C’était une jeune femme douce et délicieuse, au parfum enivrant. Je la détaillai à son insu, mais respectueusement, tant elle m’inspirait de la tendresse. Et si j’avais pu, je l’aurais prise dans mes bras. J’aurais pu me perdre en elle, entre ses cheveux noirs et ses traits tirés d’enfant sioux, et j’aurais tant aimé que Jim soit là pour me voir heureux, assis près de ce petit corps étranger.
“Un jour, je me suis perdue dans les bois, me confia-t-elle, près de la rivière Rouge. Mon père m’avait installé à l’intérieur d’un enclos de troncs d’arbre, pour me tenir sage durant son heure de pêche. J’étais une enfant de 4 ans, fascinée par la nature et les insectes, et je n’avais qu’une seule idée en tête : marcher nu-pieds sur le sol couvert de lichens. Décidée à m’échapper de l’enclos, je réussis à abattre la dernière branche qui faisait obstacle à mon évasion et à ramper jusqu’à la lisière des bois. Là, je repoussai les feuillages et découvris le cœur de la forêt mystérieuse. Dans mon esprit, ce fut comme si j’avais été un insecte : un papillon lumineux voletant au ras du sol, entre les herbes et les gros cailloux. Je voletai ainsi durant de longues heures et quand je pensai à me retourner pour voir l’enclos, je compris que j’étais perdue ! Le crépuscule tomba soudain sur ma joie et mon enthousiasme à jouer avec les fourmis. L’humidité recouvrit le sol et la cachette dans laquelle je m’étais blottie pour contenir ma peur. Je ne pus fermer l’œil de la nuit tant je redoutais les formes blanches qui bougeaient dans les frondaisons : de véritables fantômes ! Je résistai en priant mon dieu Tunkasila pour que ces démons restent éloignés. Jusqu’au petit matin où mon père me retrouva miraculeusement, enfouie sous une couverture épaisse de feuilles et de mousses…”
Elle me prit la main que je conservais sur la poignée du siège avant et m’obligea, en captivant mon regard, à me plonger dans ses yeux. J’y vis deux prunelles noires, cernées de blanc étincelant, et derrière un voile humide, je crus voir la forêt…
Plus tard dans la nuit, nous nous sommes endormis. Et ce n’est que lorsque le jour se mit à poindre – tandis que se profilait sous mes cils un vaste rayon de lumière qui tentait de s’immiscer dans mon songe – que je soulevai une première paupière, puis difficilement la seconde et que je vis briller sur l’horizon plat d’une plaine le soleil levant. L’épreuve des courbatures allait donc bientôt s’achever, car je n’avais plus qu’une heure de route avant ma prochaine escale, la ville de Pierre.
Si je n’avais pas l’impression de maîtriser les événements du voyage, j’avais le sentiment voluptueux qu’une magie m’attendait au tournant. Et à la vue de ma voisine assoupie, dont la profondeur des yeux évoquait la forêt pour moi, je fus soudain épris de bien-être. Je constatai qu’il existait encore, au cœur de ma déprime, des bons morceaux de vie à apprécier. Cette considération mit du baume à mon cœur. Ainsi, lorsque vint l’instant de me séparer de ma petite Rivière Rouge, je ne pus m’empêcher de l’enlacer et de noyer mon regard une dernière fois dans le noir de ses yeux pour y revoir la forêt. »
(p. 64-65)

William Hoper (p. 32-35)
Inipi (p. 176-178)
Extrait court
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