Collection « Petite philosophie du voyage »

  • Défis de la course (Les)
  • Écho des bistrots (L’)
  • Quête du naturaliste (La)
  • Instinct de la glisse (L’)
  • Vertiges de la forêt (Les)
  • Voyage en famille (Le)
  • Tao du vélo (Le)
  • Parfum des îles (Le)
  • Appel de la route (L’)
  • Bonheurs de l’aquarelle (Les)
  • Euphorie des cimes (L’)
  • Malices du fil (Les)
  • Ivresse de la marche (L’)
  • Force du silence (La)
  • Secret des pierres (Le)
  • Frénésie du windsurf (La)
  • Prouesses de l’apnée (Les)
  • Vie en cabane (La)
  • Fureur de survivre (La)
  • Art de la trace (L’)
  • Voyage dans l’espace (Le)
  • Ronde des phares (La)
  • Frisson de la moto (Le)
  • Légèreté du parapente (La)
  • Poésie du rail (La)
  • Hymne aux oiseaux (L’)
  • L’Engagement humanitaire
  • Grâce de l’escalade (La)
  • Temps du voyage (Le)
  • Vertu des steppes (La)
  • Facéties du stop (Les)
  • Cantique de l’ours (Le)
  • Esprit du geste (L’)
  • Écriture de l’ailleurs (L’)
  • Rythme de l’âne (Le)
  • Chant des voiles (Le)
  • Liberté du centaure (La)
  • Tour du monde (Le)
  • Fièvre des volcans (La)
  • Extase du plongeur (L’)
  • Tentation du jardin (La)
  • Vie à la campagne (La)
  • Murmure des dunes (Le)
  • Goût de la politesse (Le)
  • Caresse de l’onde (La)
  • Magie des grimoires (La)
  • Audaces du tango (Les)
  • Simplicité du kayak (La)
  • Voyage immobile (Le)
  • Attrait des gouffres (L’)
  • Soif d’images (La)
  • Mémoire de la Terre (La)
  • Enchantement de la rivière (L’)
  • Prodige de l’amitié (Le)
  • Promesse de l’envol (La)
  • Mystères du vin (Les)
  • Religion du jazz (La)
  • Charme des musées (Le)
  • Triomphe du saltimbanque (Le)
  • Sortilèges de l’opéra (Les)
  • Âme de la chanson (L’)
  • Sérénité de l’éveil (La)
  • Arcanes du métro (Les)
Couverture
La turquoise :

« La turquoise qui comme le jade n’offre aucun pouvoir colorant ni aux peintres, ni aux teinturiers, ni aux alchimistes. Et sa couleur subtile et nuancée reste insaisissable. En échange, elle semble avoir été dotée d’une énergie bénéfique qui accorde un pouvoir protecteur à ceux qui la portent. Par son réel magnétisme, la turquoise attire et séduit, et depuis des temps très reculés, elle orne des objets (bijoux, parures, masques, statues, vases…) et embellit des gestes (danses, chants, cérémonies, rituels, prières…) profanes ou sacrés.
La beauté de cette pierre est indéniable et son charme, par bonheur, ne m’a pas épargnée. Un voyage de quelques mois en Inde allait mener mes pas dans les Shivalik, ces contreforts de la chaîne himalayenne où le regard peut s’évader et venir caresser la majesté des cimes divinisées. Dans cette région de l’Uttarakhand m’attendait une très belle rencontre. Avec une femme tibétaine et, à travers elle, celle de cette pierre céleste qu’est la turquoise. Les peuples himalayens ont fait de cette roche bleu vert une pierre privilégiée liée à leur identité. De façon permanente, elle s’incruste aussi bien dans leurs bijoux temporels que dans leurs parures cérémonielles qui semblent éternelles.
Et je me souviens… Maisons regroupées dans une petite vallée. Boiseries peintes et ouvragées à l’étage. Maçonnerie chaulée au rez-de-chaussée. Portes ouvertes sur des échoppes où l’on trouve l’essentiel et un peu plus. Je flâne dans une rue étroite et colorée où la vie se passe encore dehors. Ici, chacun a une affaire à mener sur le pavé : jouer, bavarder, commercer… Moi, je me saoule. De ces instants où l’accueil est dans les sourires et dans les yeux. Chaleureux. Avec une pointe d’envie, je laisse glisser mon regard sur les boucles d’oreilles et la bague d’une femme qui se tient à l’étroit dans une boutique exiguë. Elle me fait signe. Nous échangeons quelques mots d’usage, puis nous nous risquons un peu plus loin dans la discussion. Nous avons l’amour des montagnes en commun, peut-être aussi celui de la beauté. Mais de cela, nous ne savons encore rien. Elle me raconte son pays, le Tibet, et l’exil qu’est devenue sa vie. Rencognée dans son échoppe, elle ne me parle pourtant que d’espace et de liberté. Et ses mains, dans des gestes de reine, volent devant son visage comme deux oiseaux bagués. Je lui parle du coin de terre où je vis tout en regardant dans la profondeur de ses yeux noirs un nuage blanc passer et s’effilocher. Dans son élégance, elle me sourit.
Soudain, elle se baisse et sort de je ne sais où une boîte menue qui ne ferme plus. Dedans, une poignée de perles colorées où se mêlent ambre, turquoise et corail. Je les fais rouler entre mes doigts, les regarde avec attention et tendresse. Dans le creux de ma main, j’en garderai trois. Trois petites pierres ni vertes ni bleues, veinées de noir. Je cherche ma monnaie d’échange. Pendant ce temps, Nyima a emballé mon trésor dans un morceau de tissu. Une poignée de roupies contre une poignée de pierres. Dans cette fraternité juste ébauchée, je lui souris. En me tendant mon précieux paquet, elle me souffle : “Les turquoises protègent les voyageurs. Celles-ci prendront soin de ta vie.” Deux regards. Et les sourires se sont agrandis. Petite histoire d’un partage. Aussi, même s’il fut passager, jamais je ne l’oublierai. Lorsque, un peu plus tard, je déplierai l’étoffe qui protège mes trois petites pierres, j’en découvrirai cinq. Cinq turquoises qui ne m’ont jamais quittée. Aujourd’hui encore, avant de partir rôder entre les rochers du Diois, vadrouiller sur les hauts plateaux du Vercors ou saluer un glacier alpin, il m’arrive souvent d’en glisser une dans le fond de ma poche. J’aime sentir sa présence près de ma peau. Et, lorsque dans le soleil de l’hiver, je la dépose sur un petit lit de neige à peine froissé par le vent, c’est un peu comme si le ciel faisait don à la terre d’un morceau d’azur et de lumière. »
(p. 56-60)

Le volcan (p. 33-36)
Les fossiles (p. 84-86)
Extrait court
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