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Des comédiens en marche de Barcelone à Bruxelles
par
le jeudi 8 février 2007 à 20 heures 30


Des comédiens à pied, avec leur théâtre ambulant fait de toiles et de lumières. À pied pour observer. À pied pour comprendre. À pied pour écouter. Pour que les habitants des communes qui, par manque de moyens et d’infrastructures, n’ont guère l’occasion d’accueillir des spectacles, sentent l’importance de leur engagement. À pied pour être attendus et reçus, pour accueillir et être accueillis.
D’avril à la mi-juin 2006, la troupe du théâtre de l’Étreinte a marché de Barcelone à Bruxelles afin de porter son art jusque dans les villages les plus reculés. Cette marche transnationale, de l’Espagne à la Belgique, est venue compléter une longue expérience de l’itinérance puisque, de Dunkerque aux Saintes-Maries-de-la-Mer en 1999 et de Romainville à Romainville en passant par la Lozère en 2002, cette troupe s’est déjà produite dans plus de cent cinquante communes de France, avec La Légende des porteurs de souffle et La Légende d’Antigone, écrites par Philippe Fenwick et mises en scène par William Mesguich. C’est une autre tragédie qu’elle a présentée cette fois-ci, Confusion, La légende de l’Étoile. La Silendrie et l’Ambroisie, unies depuis cent cinquante ans sous le nom de république fédérative de l’Étoile, en viennent à prendre les armes l’une contre l’autre. L’Ambroisie, qui compte un tiers de Silendrins, a en effet choisi de proclamer son indépendance. Après neuf ans d’état de siège en Ambroisie, neuf ans d’atrocités et de barbarie, l’Union des Nations bombarbe la Silendrie, qui passe pour l’agresseur. À Viatka, la capitale silendrine, au cabaret de l’Étoile, au cinquante-cinquième jour des bombardements, sept personnes vont tenter une dernière fois de se comprendre et de s’aimer peut-être. On l’a compris, cette tragédie est une réflexion sur les malheurs de l’ex-Yougoslavie, sur les conflits qui, à une heure trente d’avion de Paris, ont déchiré la Croatie, la Bosnie, le Kosovo et la Serbie de 1991 à 1999. Soixante fois, au terme de journées marathon, la troupe a donc présenté cette pièce. Soixante fois elle s’est levée à l’aube pour élaborer le programme de la journée. À 9 heures, en même temps que les équipes cuisine et montage qui les précédaient, les comédiens partaient pour une marche de 25 km. Après un déjeuner au point repas, ils reprenaient la progression pour arriver à l’étape à 16 heures 30. Intervenir dans les écoles et répéter les chants précédaient la parade dans les rues pour annoncer le spectacle qui commençait à 20 heures 30, lui. Après le démontage à 22 heures, toute la troupe était généralement conviée à un dîner festif où la bonne humeur et l’hospitalité rurales éclataient.
Au terme de ces expériences renouvelées, Philippe Fenwick et sa troupe, riches de 7 000 kilomètres à pied, se souviennent avec émotion de la traversée des Pyrénées dans la neige de l’Ariège, de la fanfare, des banderoles et du buffet qui les ont accueillis à Verdun-sur-Garonne, des histoires entachées de superstition que de vieux Auvergnats leur ont confiées au bord des routes, de l’instituteur de la Thiérache qui a cheminé avec eux jusqu’en Bourgogne, de l’accueil des vignerons champenois et des folles nuits dans les caves rémoises, de la splendeur méconnue des forêts ardennaises et, en vue de Bruxelles, de la rencontre avec les Baladins du miroir, une compagnie belge de théâtre itinérant.
C’est à la manière des veillées d’autrefois, entouré par quelques musiciens, que tous ces souvenirs sont évoqués. Aventures faites de rencontres, d’espoirs et d’égarements, aventures où le temps est le complice intime du voyage.


Né en 1972, Philippe Fenwick, après avoir suivi les cours du conservatoire, a étudié à l’École supérieure d’art dramatique Pierre Debauche – Françoise Danell de Toulouse et pris part à la création du théâtre du Jour d’Agen. Depuis 1996, il a joué comme comédien dans plus de vingt créations, que ce soit le personnage d’Harpagon dans L’Avare de Molière, du comte dans La Seconde Surprise de l’amour de Marivaux, de Comporéal dans Ruy Blas d’Hugo ou de Koulyguine dans Les Trois Sœurs de Tchekhov. Il a aussi écrit de nombreuses pièces originales, dont deux sont publiées, dans lesquelles il a joué sous la direction de William Mesguich avec lequel, en 1998, il a créé la Compagnie du théâtre de l’Étreinte. Cette dernière s’est aussi fait remarquer par des spectacles musicaux comme Le Cabaret des monstres (sur des textes de Rabelais, d’Aragon, de Dubillard, et des chansons de Gainsbourg et d’Higelin) ou L’Histoire du soldat d’Igor Stravinski. Soucieuse de sensibilisation des jeunes, elle a porté à la scène des textes de Charles Perrault, de La Fontaine et des Frères Grimm. Dans le cadre de la Compagnie du théâtre de l’Étreinte dont il assure la direction artistique avec William Mesguich, Philippe Fenwick organise régulièrement des lectures et anime des ateliers dans les communes de la Seine-Saint-Denis et à Paris, quand il n’intervient pas à l’École nationale des arts du cirque de Rosny-sous-Bois, où l’une et l’autre sont en résidence. Philippe Fenwick, qui en a été le vice-président, s’occupe par ailleurs de la commission de publication du Centre international pour le théâtre itinérant, basé à Hérisson, en Auvergne.




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