Collection « Petite philosophie du voyage »

  • Défis de la course (Les)
  • Écho des bistrots (L’)
  • Quête du naturaliste (La)
  • Instinct de la glisse (L’)
  • Vertiges de la forêt (Les)
  • Voyage en famille (Le)
  • Tao du vélo (Le)
  • Parfum des îles (Le)
  • Appel de la route (L’)
  • Bonheurs de l’aquarelle (Les)
  • Euphorie des cimes (L’)
  • Malices du fil (Les)
  • Ivresse de la marche (L’)
  • Force du silence (La)
  • Secret des pierres (Le)
  • Frénésie du windsurf (La)
  • Prouesses de l’apnée (Les)
  • Vie en cabane (La)
  • Fureur de survivre (La)
  • Art de la trace (L’)
  • Voyage dans l’espace (Le)
  • Ronde des phares (La)
  • Frisson de la moto (Le)
  • Légèreté du parapente (La)
  • Poésie du rail (La)
  • Hymne aux oiseaux (L’)
  • L’Engagement humanitaire
  • Grâce de l’escalade (La)
  • Temps du voyage (Le)
  • Vertu des steppes (La)
  • Facéties du stop (Les)
  • Cantique de l’ours (Le)
  • Esprit du geste (L’)
  • Écriture de l’ailleurs (L’)
  • Rythme de l’âne (Le)
  • Chant des voiles (Le)
  • Liberté du centaure (La)
  • Tour du monde (Le)
  • Fièvre des volcans (La)
  • Extase du plongeur (L’)
  • Tentation du jardin (La)
  • Vie à la campagne (La)
  • Murmure des dunes (Le)
  • Goût de la politesse (Le)
  • Caresse de l’onde (La)
  • Magie des grimoires (La)
  • Audaces du tango (Les)
  • Simplicité du kayak (La)
  • Voyage immobile (Le)
  • Attrait des gouffres (L’)
  • Soif d’images (La)
  • Mémoire de la Terre (La)
  • Enchantement de la rivière (L’)
  • Prodige de l’amitié (Le)
  • Promesse de l’envol (La)
  • Mystères du vin (Les)
  • Religion du jazz (La)
  • Charme des musées (Le)
  • Triomphe du saltimbanque (Le)
  • Sortilèges de l’opéra (Les)
  • Âme de la chanson (L’)
  • Sérénité de l’éveil (La)
  • Arcanes du métro (Les)
Couverture
Un sobre gourmand :

« Parmi les défauts que l’on reproche à tort aux ânes, le pire est la fourberie. Non, l’âne n’est pas sournois ! Il peut être futé, attendre que le maître s’en aille pour pousser un verrou, ou ronger sa longe pour s’enfuir. Il ne finasse pas par machiavélisme, mais parce qu’il a senti la présence de ses pairs, un peu plus loin, ou alors par gloutonnerie, tout simplement. Eh, oui ! Ce frugal est en réalité un gourmand. Il se contente de peu, mais il est capable de manger à s’en rendre malade. Un âne dans une prairie trop riche broutera à en devenir fourbu et ne plus pouvoir marcher normalement. Rien n’échappe à ces herbailleux. Pas le plus petit trèfle, la fétuque la plus gracile, le pissenlit le plus infime. Il vous arrache le bras, s’arrête tous les dix pas pour taquiner le plantain. D’une traction de longe et d’un “non !” ou d’un “allez !” vifs, il faut lui enseigner qu’il y a un temps pour tout, et qu’on ne grignote pas en marchant. On jure beaucoup en se promenant avec une bourrique… Alors votre compagnon détourne à contrecœur son museau de la tige prometteuse, et se résigne à poursuivre son chemin, l’oreille ballante et le regard désespéré, comme s’il s’agissait de sa survie – bien que souvent, un coup d’œil à la panse en dise long sur ses réserves. Cela dit, un peu de graisse n’est pas malfaisant, et permet de surmonter les périodes de disette qui ne sont pas toujours celles qu’on pense. Il y a des étés meurtriers.
Conques rissolait. Le bétail, dans les pâtures roussies, n’avait plus rien à ruminer, si ce n’est quelque interrogation sur l’avenir de la graminée dans un monde régenté par l’homme. Depuis le début de l’été, les fermiers entamaient les réserves de foin. Faute de grain, que faire ? L’âne est un animal sobre, on finira par le savoir, qui “se contente des herbes les plus dures, les plus désagréables, que le cheval et les autres animaux lui laissent et dédaignent”. Buffon a beau dire, quand la flore des bords de chemin est brûlée par la canicule, que la ronce a disparu des sous-bois et le pâturin des talus, il faut tout de même nourrir suffisamment un âne qui marche 20 kilomètres par jour avec 40 ou 50 kilos sur le dos. Pour qui a un peu perdu le fil des traditions et des savoirs, ici encore, l’âne permet de renouer avec eux. Nos quadrupèdes nous mirent sur la voie : ayant repéré un congénère dans la vallée, ils entamèrent une conversation sonore qui attira l’attention de leurs maîtres respectifs. Celui de l’âne solitaire coupait des branches de frêne quand le grain se faisait rare, suivant une pratique héritée du mésolithique. Le frêne, l’Yggdrasil de la mythologie nordique, arrosé par les fleuves intarissables, même par temps de canicule, de la Sagesse et du Destin, vient au secours de l’ânier itinérant quand la pénurie menace. Dans certaines régions, il est utilisé comme arbre fourrager pour le cheptel léger, comme les chèvres et les moutons. Bien plus tard, lors d’une longue escale en Castille, nous verrons notre voisine et pourvoyeuse de lait frais tailler ses frênes en têtard pour augmenter la production du feuillage dont elle se sert comme fourrage l’hiver, et même l’été quand la sécheresse grille ses pâturages. Le seul inconvénient est que le lait y gagne un peu d’amertume. »
(p. 44-46)

À l’écoute de son compagnon (p. 34-36)
L’âne en fête (p. 63-65)
Extrait court
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