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Kora Gorum – corridor du Wakhan (Afghanistan)
Année 2011
© Lou Nodet
Ancienne championne de ski télémark, pigiste pour L’Alpe et diverses revues de montagne, institutrice. Boulangère bio.

Pèlerinage au Népal :


« C’est pour nous que je reviens avec Lou, un an et demi après la mort de Philippe. C’est dur d’écrire ce mot, toujours cet espoir insensé de le voir sur le seuil de la porte, écrasé par son gros sac de parapente, le nez brûlé par le soleil, le sourire aux lèvres, le regard déterminé et hyperactif, la tête pleine de rêves pour nous. Je ne pouvais pas vivre sans mener ce projet que nous avions ensemble : nous rendre tous les trois au Népal pendant plusieurs mois, monter vers la montagne de Cristal dans le Haut-Dolpo, puis vivre ici simplement après ce temps d’itinérance. Alors, à mon tour, je me suis abîmée les yeux sur les cartes pour imaginer notre route, et je l’ai osée. Elle fut l’exact contraire de celle de Philippe, qui était dictée par les vents dominants. Pour nous, l’important était de passer les zones d’altitude (avec un col à 5 700 m) avant les éventuelles chutes de neige qui auraient pu nous bloquer, et les grands froids de l’hiver. Lou avait 5 ans, elle était forte dans sa tête et son corps. Écrasée par l’ampleur de la tâche que je m’étais assignée, j’ai pourtant toujours eu confiance. Je savais que ce que j’entreprenais était juste. Durant deux mois, nous avons progressé au rythme lent de notre petite caravane. Et j’ai trouvé dans cette pesanteur de la marche une véritable grâce. Découvert qu’au-delà de se nourrir l’une l’autre, la grâce et la pesanteur étaient un tout. Un tout faisant vivre mon cheminement extérieur et intérieur.
Le 28 octobre, nous aboutissions à Kopdhe, village posé en équilibre sur une crête, aux premières loges du Saipal et de l’Api. Finir notre marche là où il s’envola en 2007. Pour moi pas d’envol, juste de la sérénité. Des gens du coin se souvenaient bien du fou volant, et on nous indiqua le décollage que choisit Philippe. Lou s’y rendit avec le carnet de voyage de son papa à la main. Au-dessus de nos têtes, une rue de cumulus invitait à l’échappée belle. Tête vide et lourde à la fois. Lou émue et inquiète de se trouver exactement au bon endroit. Peut-être sentait-elle que notre “mission” prenait fin ici. Notre voyage à trois touchait à son terme. Il était temps de quitter ces lieux et de commencer un nouveau voyage à deux. Basculer de manière radicale du côté de l’avenir. »


Extrait de :

Envolées belles, Une histoire de vol bivouac
(p. 156-158, 2013, rééd. 2014)


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