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San Diego (États-Unis)
Année 2008
© Michèle Guieu
Journaliste et écrivain.

Prologue :


« J’ai découvert Kerouac peu de temps après la mort de mon père. J’étais à peine remis d’une fracture de la main – que je ne raconterai pas en détail, sauf à dire qu’elle était justement liée à la mort de mon père et à cette lamentable et déprimante impression que tout était foutu. Ma vie ne me ressemblait pas. Vous savez, comme ces nuits où l’on se réveille à 3 heures du matin, sans pouvoir se rendormir. On a toujours l’impression d’avoir raté sa vie à 3 heures du matin…
Je venais de lire un autre Jack, London. Je voulais l’imiter. J’avais soif d’aventures et de liberté. Je voulais devenir écrivain. Avec l’arrivée des frères Jack dans ma vie commença le chapitre qu’on pourrait appeler “L’appel de la route” : The Call of the Road… J’avais souvent rêvé de partir, formant de vagues projets que je n’exécutais jamais. Je remettais toujours à plus tard. Jusqu’au jour où…
Les premiers échos que j’eus de Kerouac me vinrent d’une jeune et jolie Bretonne, prénommée Stéphanie. Elle travaillait comme blanchisseuse dans une colonie de vacances, basée dans le Cantal à Vic-sur-Cère, où j’enseignais le ski à des gamins de 8 ans. J’en avais 20. Elle un peu plus. Elle était aussi blonde que gironde et, un soir où nous discutions de voyages, dans un bar enfumé et bruyant d’Aurillac, cette jolie fille, avec de longues boucles pareilles à des vagues d’or, me raconta avoir traversé l’Afghanistan en solitaire, dormant seule dans le désert glacé la nuit, brûlant le jour. C’était au milieu des années 80…
Comme je tenais la crève, je tentais de me soigner à coups de grog, ce qui n’avait fait qu’empirer ma fièvre. Moi qui venais de lire la biographie de Joseph Kessel (par Yves Courrière, décédé en 2012), ivre d’amour de la vie (pour Stéphanie, forcément), j’ai soudain pris conscience que je n’étais pas allé plus loin que l’Espagne, l’Angleterre et l’Italie. Et encore, avec mes parents, ou en voyage scolaire… Exalté par les effets du rhum brûlant, je lui ai confié mon envie de partir en Amérique, pour marcher sur les pas de Jack London, en Californie. Ses récits de voyage dans le Grand Nord et dans les mers du Sud avaient bercé mon adolescence, dans ma blême HLM. Stéphanie m’a alors parlé d’un autre Jack que l’auteur de Martin Eden et L’Appel de la forêt. Un Jack au nom à consonance bretonne… sorte de petit frère du premier : Kerouac. Je trouvais que ça sonnait bien. Kérrrouaccc. Un nom solide comme un menhir. Puis elle m’a dit ceci : “Si tu ne pars pas à 20 ans, tu ne partiras jamais !”
Cette phrase a agi sur moi comme un électrochoc. »


Extrait de :

Sur la route again, Aux États-Unis avec Kerouac
(p. 15-16, Transboréal, « Sillages », 2013)

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